Tisserand de la compréhension du devenir
Conférencier, expert et auteur

Responsabilité Sociétale et Environnementale des Entreprises

La RSE n'est pas un problème de réglementation, mais une manière de vivre.

La RSE participe d'un mouvement très vaste qui, pour le résumer en une phrase, affirme qu'il faut que l'homme cesse de croire qu'il est "hors-sol", qu'il vit au-dessus de la réalité naturelle, qu'il n'en fait pas partie intégrante, qu'il n'a de compte à rendre à rien ni personne, et qu'il est "la mesure de toute chose" comme le proclama Protagoras d'Abdère et, après lui, toute la Modernité depuis René Descartes.

Deux affirmations s'opposent avec véhémence : celle de la Bible hébraïque qui dit que l'homme est mis dans le Jardin " pour le servir et le protéger"  et celle de Descartes qui affirme que l'homme a droit et devoir de "maîtriser et posséder" la Nature.

Deux visions diamétralement opposées se collettent dans ces assertions : celle de l'homme dans la Nature et celle de l'homme au-dessus et contre de la Nature.

Cette deuxième vision a pu faire illusion pendant ces siècles passés où l'homme était bien peu nombreux sur Terre (cent millions en l'an 0 et un milliard en l'an 1800). Tous les pillages et saccages de l'homme était bénins et notre Gaïa avait encore suffisamment de forces et de réserves pour réparer les dégâts humains. Aujourd'hui, ce n'est plus le cas. En moins de deux siècles, les activités économiques humaines ont consommé 80% du total des ressources non renouvelables que notre planète avait patiemment accumulées durant des milliards d'années.

L'homme n'est plus la mesure de toute chose ! L'homme ne peut plus se croire au-dessus des réalités naturelles !  Malgré les illusions qu'alimente la vie urbaine déconnectée de la grande et vraie Vie, l'homme doit comprendre qu'il ne vit pas "hors-sol".

La RSE tend à renouer les liens qui doivent unir l'entreprise à son environnement social et naturel. L'entreprise non plus, ne fonctionne par "hors-sol". Elle est constamment traversée de flux que lui fournissent la communauté humaine et le milieu naturel.

Pour comprendre les linéaments de ce changement de paradigme, l'expression RSE offre trois mots-concepts : Responsabilité, Sociétale et Environnementale.

Responsabilité.

Philosophiquement, l'idée de responsabilité est indissociable de l'idée de liberté. Qui n'est pas libre, ne peut être responsable. On ne peut être responsable que de ce que l'on choisit et décide de faire ou de ne pas faire.

Si c'est la loi étatique qui impose, directement ou indirectement, des obligations sociétales et environnementales, on ne peut plus parler de responsabilité des entreprises.

Le soupçon murmurant que les patrons doivent être contraints par l'Etat pour faire ce qui est bien, est proprement insupportable. Je connais bien plus de politiciens véreux et cyniques que de patrons salauds ou voyous.

Sociétale.

Toute entreprise est une personne morale aux yeux du Droit. Une personne, donc, comme les autres, comme vous et moi. Un organisme vivant inscrit dans un tissu serré de relations avec la société civile. Une de ces relations est, bien sûr, la relation d'emploi : relation qui peut être respectueuse ou méprisante, épanouissante ou aliénante, joyeuse ou maussade, … Le vent managérial souffle aujourd'hui vers une relation d'emploi fondée sur la collaboration, sur la responsabilisation, sur l'autonomie (qui n'est pas indépendance mais interdépendance). Au-delà de le relation d'emploi, il y a aussi toutes les autres relations de voisinage avec leurs synergies à développer et leurs nuisances à atténuer.

Environnementale.

Toute entreprise est aussi un organisme vivant inscrit dans le trame de la Vie sur Terre, par les ressources qu'elle consomme, par les déchets qu'elle rejette. Il faut rappeler que toute activité économique est soumise à la loi d'airain du second principe de la thermodynamique qui dit que tout rendement est toujours inférieur à un. C'est-à-dire que pour produire quelque chose, on détruit plus que l'on ne produit. Les ressources devenant rares et notre mère Gaïa étant bien mal en point, il est essentiel de replacer la relation avec la Nature au sommet de nos priorités au travers du principe de Frugalité.

Vers une conclusion.

Le problème n'est plus de promulguer lois, décrets et réglementations. Toute loi est contournable par les voyous. Le problème est de construire une prise de conscience. Le choix est : rendre la vie viable et vivable - ou pas - pour nos petits-enfants et leurs enfants.

Marc Halévy, février 2017