Tisserand de la compréhension du devenir
Conférencier, expert et auteur

Eloge de l'asocialité.

Réveillonnez ensemble ? Non, merci !

Pourquoi voudriez-vous que je côtoie les autres humains ? Ils sont majoritairement ignares, vulgaires, médiocres, incultes, méchants, envieux et idiots.

Moi, je vis pleinement avec ma femme adorée qui me comble de tout, ma chienne, des arbres feuillus et fruitiers, des mésanges, un rouge-gorge pas du tout farouche, quelques pics épeiches, une famille de faisans qui se pavanent dans mon jardin, des écureuils partout, quelques chevreuils ou renards qui passent, des chouettes qui nichent dans le tilleul à côté de ma chambre, des lavandes et une glycine énorme, des lilas pour le printemps … et, puis, j'ai trois mille livres (au moins) qui recèlent tout ce qui a été écrit d'intelligent depuis quatre mille ans.

Que pourrait donc m'apprendre un humain vivant qui n'ait pas déjà été mieux écrit bien avant lui et dans un autre sabir que le sien ?

 

Le couple, d'abord :chacun son chéri … et le reste dans les livres. La socialité doit se réduire au seul couple. Hors travail productif et réel en équipe (ou chacun est interdépendant de tous les autres), tout ce qui requiert plus de deux personnes ensemble au même moment, est soit perversion, soit perte de temps, soit fuite de soi.

Il faut prôner l'autonomie et l'autarcie affectives. Le conjoint seulement ... quant au reste : des fournisseurs. Rien de plus. L'humain est un animal asocial.

La socialité est une invention artificielle des parasites qui ne se suffisent pas à eux-mêmes et qui veulent pomper l'énergie vitale des autres, faute de pouvoir la générer par eux-mêmes.

Moins les humains s'occuperont les uns des autres, plus chacun aura la paix. Et la paix de tous est la résultante de la paix de chacun.

J'entends : "Il faut faire des choses ensemble, avec d'autres" … Ah oui ? Quoi ? Et pourquoi ? Et pour quoi faire ? Non ! Trois objections majeurs et politiquement incorrectes …

Solitaire (à deux) ? oui !

Misanthrope ? Oui !

Asocial ? Oui !

 

La socialité sert uniquement à former des couples ; dès que c'est fait, le couple s'isole pour vivre SA vie en paix, loin des autres … Et il ne reste alors, sur la piste de dance sociale et râpeuse, que les laissés-pour-compte qui s'agitent les couilles ou les nichons dans une avalanche de trop de décibels, de trop de palabres, de trop de falbalas qui tentent de remplir leur abyssal vide de vie.

Hors les parasites, aucun couple n'a besoin des autres pour vivre heureux : on a seulement parfois besoin de ce que "les autres" font, pour vivre replet (les autres alors sont juste des fournisseurs).

Ce sont les parasites qui ont inventé la "socialité". Selon l'étymologie grecque, un "parasite" est quelqu'un qui "se nourrit à côté de" lui.

 

La soi-disant nécessité de "socialité", de "vivre-ensemble", de "convivialité" est un sous-produit frelaté de l'humanisme moderne (la "famille humaine", la solidarité universelle, l'égalitarisme, la communion des opprimés), lui-même issu de la mièvrerie du christianisme : "Aimez-vous les uns les autres" (la Torah est bien plus claire : "Aime ton ami comme toi-même" … quant aux autres …) ou "Tous les hommes sont frères" (repris par Gandhi).

Aimer ? Je n'aime que mon conjoint ; avec tous les autres je compose pour qu'ils me fichent la paix en me fournissant ce que je souhaite. Même la relation avec les enfants du couple pose question : dès qu'ils ont fondé leur couple et qu'il y ait, ou non, fait des enfants, ils ne demandent que leur intimité et la paix dans leur foyer.

 

Quelqu'un qui cherche, constamment ou souvent, le contact avec les autres, prouve qu'il n'est pas complet, qu'il est en manque, qu'il lui manque l'autre moitié de lui-même : il lui manque "sa moitié".

Qui n'en connaît des myriades, de ceux-là : "Ah, il faut qu'on se voit ! – Ah, pour quoi faire ? – Il faut qu'on se parle ! – Ah, et de quoi ? – De tout de rien ! Il faut qu'on se voit quoi ? Pour passer un bon moment ensemble". Et voici l'aveu final qui dit tout : "Tu me manques". Non, mon pauvre, c'est toi qui t'es manqué.

 

La seule exception à toute cette asocialité, c'est la communion durable, impliquante et créative d'un tout petit groupe dans un projet commun qui les dépasse tous (et le couple est un tel projet à deux, une communion absolue).

C'est là que l'on passe de la socialité ouverte (le gnangnantisme social et snobinard) à la communauté fermée.

C'est là que l'on peut sortir du nombrilisme convivial en se mettant au service d'une construction qui dépasse ceux qui s'y impliquent.

 

Marc Halévy - Le 02/01/2021