Tisserand de la compréhension du devenir
Conférencier, expert et auteur

Facebook et autres … La dérive du Web

Le succès de Facebook est l'exacte mesure de la misère existentielle et spirituelle de nos contemporains.

Facebook et consorts sont l'expression la plus massive de la grégarité des médiocres. Pour le première fois dans l'histoire de l'humanité, les animaux humains peuvent entrer en contact, sans frais et sans fatigue, avec un nombre quasi illimité de leurs semblables sans risque physique ni promiscuité.

Ce qui interpelle, dans ce phénomène absurde, c'est la raison de leur atavique grégarité aussi inutile que stérile, c'est la raison de cet irrépressible besoin de "communiquer" c'est-à-dire de partager le vide de leur existence aussi vaine que futile.

Et là se trouve la clé de l'énigme : c'est précisément parce que leur vie est vide, vaine et futile que le besoin de partager, de rassembler, de faire masse devient impérieux.

Le succès de Facebook est l'exacte mesure de la misère existentielle et spirituelle de nos contemporains.


Jeux … Panem et circenses … en version numérique et massive

Hier, j'avais mission d'apporter une réflexion prospective à des cadres d'un très gros fournisseur de téléphonie et d'accès Internet. Outre que ces cadres se plaignent de recevoir trop de courriels et d'appels téléphoniques, ce qui m'a frappé est que toutes les stratégies de cette entreprise et de ses concurrents tournent autour d'un seul mot clé : le divertissement. Ma musique, mes photos, mes "amis", mes "chats", mes favoris, ma météo, mes jeux … Il suffit de considérer la nature des i-pads et autre smartphones - ou, même, ce que l'on sait de la nouvelle version de Microsoft Office avec écran tactile - pour comprendre que cette informatique-là n'est plus un outil de travail, mais bien un outil de loisir.

Loisir. Divertissement. Grégarité. Jeux … Panem et circenses … en version numérique et massive.

Dès qu'un outil d'intelligence se démocratise, se massifie, il se pervertit et devient un outil de médiocrité. Gutenberg avait inventé l'imprimerie à caractères mobiles pour éditer la Bible et diffuser le savoir … aujourd'hui, l'imprimerie est massivement au service de la publicité, de France-Dimanche, de Télé7Jours et des mangas … La télévision était vue, dans les années 1950 et 1960 comme un instrument d'éducation et de diffusion de la culture (la vraie) … aujourd'hui, elle s'est pourrie de reality shows, de feuilletons américains débiles, la "musique" rap ou sexy, et de culte de présentateurs vedettes dont le QI est égal à celui de ceux qui les regardent … Le Web n'échappe pas à la règle … Il fut rêvé comme l'instrument mondial d'accès à la connaissance universelle … il est devenu le plus grand dépotoir de bêtises, de perversions et de futilités jamais imaginé.

Très généralement et profondément, le web et tous les gadgets numériques qui gravitent autour de lui, sont devenus des jouets, des instruments ludiques et non cognitifs. Leurs évolutions ne vont pas du tout dans le sens de l'avènement de la société de la connaissance, mais bien dans le sens d'une accélération de la société du ludique. Le principe de plaisir triomphe du principe de réalité, le contact avec le réel est perdu et l'existence s'enfonce dans les marais du virtuel.

Marc Halévy

Le 07/06/2010