Tisserand de la compréhension du devenir
Conférencier, expert et auteur

Comprendre Hegel …

Philosophie de l'Esprit. Philosophie de la Nature. Philosophie de l'Histoire.

Tripode hégélien : Esprit, Nature, Histoire.

L'Esprit désire le Réel (c'est la propension eidétique, le projet du Réel).

La Nature manifeste le Réel (c'est la propension volumétrique, le territoire du Réel).

L'Histoire crée le Réel (c'est la propension dynamique, l'activité du Réel).

Le Réel est, à la fois, Esprit, Nature et Histoire … sujet, objet, projet … acteur, agi, action … œuvrier,  œuvre, œuvrer … le Logos, le Topos, le Tropos, etc …

Impossible de comprendre et connaître le Réel sans comprendre et connaître les trois.

Impossible de comprendre et connaître l'un des trois, sans comprendre et connaître les deux autres.

Cette dialectique tripolaire engendre de l'ordre, un Ordre dynamique progressif qui, à la fois, réalise l'Esprit, construit l'Histoire et se manifeste dans la Nature. Pour Hegel, si l'on regarde les sociétés humaines travaillées, elles aussi, par le tripode fondateur du Tout, l'Ordre résultant s'incarne dans l'Etat (dont les institutions gouvernementales ne sont que de faibles et pâles reflets)

Comment, partant des apparences trompeuses dont ses sens le nourrissent, le penseur peut-il atteindre enfin le Réel ? Par la dialectique, en imitant le mouvement du Réel lui-même dans son propre Devenir.

Cette méthode dialectique consiste, dans un premier temps,  à acter l'apparence,  puis, dans un deuxième temps, à postuler, par négation, un plus-réel derrière cette apparence (ce qui disqualifie l'apparence) et , enfin, dans un troisième temps, à découvrir ce plus-réel qui, ipso facto, devient une nouvelle apparence, mais de niveau supérieur, donc plus réelle. Et ainsi de suite, à l'infini … dans une escalade spirale qui monte de l'apparence sensible la plus grossière à la réalité réelle le plus sublime.

Donnons un exemple emprunté à Nietzsche : l'idée de Bien (paix et joie) nait, par négation, de l'idée de Mal (violence et souffrance). Ces deux idées se transcendent par l'idée de morale qui, elle-même, en se niant dans le dogmatisme et le fanatisme, engendre le nihilisme. Nietzsche tente alors le double dépassement de la morale et du nihilisme dans une forme d'éthique amorale.

Contrairement à ce que l'on répète souvent, Hegel n'est pas un idéaliste au sens platonicien ou kantien du terme, mais un spiritualiste qui place l'Esprit en amont de toutes ses manifestations naturelles ou idéelles. Hegel n'est pas non plus rationaliste, même s'il place le Logos au centre de l'Esprit. Pour comprendre Hegel, il faut distinguer la "raison" en tant que principe de cohérence cosmique, en tant que Logos au centre du Réel, en tant que principe de consistance du Tout, d'avec la "raison" en tant que faculté humaine de raisonner logiquement et d'établir des rapports (ratio) entre les phénomènes. Le rationalisme ne concerne que cette seconde acception du concept "raison" : une doctrine qui pose que les connaissances humaines ne procédant pas exclusivement de la raison logique humaine, sont fausses et à proscrire. Lorsque Hegel écrit : "Tout ce qui est réel est rationnel, tout ce qui est rationnel est réel", il ne dit pas autre chose que ceci : tout ce qui existe, naturel comme idéel, participe du Logos au centre de l'Esprit dont tout émane, dont tout procède. Il ne parle aucunement de rationalisme humain !

Marc Halévy

Le 01/02/2012