Tisserand de la compréhension du devenir
Conférencier, expert et auteur

Le sens de la Vie

La vie a-t-elle un sens ? Et si, d'aventure, elle n'en avait pas, comment lui en donner un ?

Kant disait que toute philosophie se devait de répondre à trois questions : que puis-je connaître ? que puis-je faire ? que puis-je espérer ?  Autrement dit : la Vérité, la Morale et le Salut.

Le philosophe des "Lumières" ajoutait que ces trois questions se réduisent, au fond, à une seule : qu'est-ce que l'homme ?

La question du sens de la vie touche la troisième question kantienne : que puis-je espérer ? car, si la vie n'a aucun sens, comme le prônent les philosophies de l'absurde, alors il n'y a rien d'autre à espérer … que le plus grand désespoir.

La vie a-t-elle un sens ? Et si, d'aventure, elle n'en avait pas, comment lui en donner un ?

La question posée appelle une réponse concrète, dans l'ici et le maintenant. Pour façonner cette réponse, besoin est de bien comprendre que l'existence de chacun est existence dans le réel tel qu'il est et tel qu'il est.

Le réel de soi, d'abord : quelle est ma réalité profonde ? qui suis-je vraiment ? quel est mon vrai destin ? ma profonde vocation ?

Le réel des autres, ensuite, de ceux que j'aime, de ceux qui m'indiffèrent, de ceux que je déteste : qui sont-ils ? qu'espèrent-ils ou redoutent-ils de moi ? que puis-je attendre ou craindre d'eux ? comment me libérer de la pression d'autrui et fonder ma liberté afin de m'accomplir et de rayonner vers eux, ensuite ?

Le réel du monde, encore, de cette Nature qui m'entoure et que la Modernité, dans sa trépidation et dans ses artificialités, m'a fait presque oublier : me relier à la Vie cosmique, au-delà des vies humaines.

Le réel du Divin, enfin : bien au-delà de Dieu ou des dieux, il y a ce Divin qui permet de sacraliser la Vie sous toutes ses formes, qui invite à se sublimer, à se relier au Tout.

Le secret du sens de la vie est, en un mot, celui de la reliance au réel, à toutes ces faces du réel. Et cela implique, d'abord, d'accepter et d'assumer le réel tel qu'il est tel qu'il va. Toutes les utopies ont toujours débouché sur des boucheries, sur des massacres, sur des persécutions. Notre sagesse de l'après-modernité commence par cette prise de conscience : les idéalismes et les idéologies sont des folies. Ce n'est pas le réel qu'il faut haïr, mais bien notre ignorance de ce réel. Sortir l'homme du réel en croyant qu'il vivra mieux dans l'idéal, revient à sortir un poisson de l'eau tumultueuse du torrent pour le plonger dans une piscine chlorée peinte en bleu céruléen.

Le secret du sens de la vie implique, aussi, d'accepter et d'assumer le destin de l'humanité. Paradoxalement, de tous les animaux, l'homme est celui qui a le destin le plus exaltant (celui de faire émerger l'Esprit dans le Réel) et celui qui refuse très majoritairement d'assumer ce destin (qui, pourtant, fonde à la fois sa nature, son sens, sa valeur et la voie de son propre accomplissement et, donc, de sa propre joie de  vivre). Ce refus de son destin fonde le malheur et la misère des humains ; ce refus est à la fois leur péché originel et leur enfer.

Donner du sens au quotidien de sa vie, c'est d'abord s'émerveiller de vivre, s'émerveiller de la Vie, de cette Vie que l'on porte en soi comme un don, de la Vie autour de soi et qui se déguise en un enfant, en un amour, en un brin d'herbe ou une mésange, de la Vie du grand Tout qui coule vers son destin dont chacun de nous participe pleinement.

Tout reste à accomplir, en soi et autour de soi, tout le temps : c'est cela qui est merveilleux !


Marc Halévy, 17 juillet 2013.

Article pour Human&Terre - Laurent Espinosa

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