Tisserand de la compréhension du devenir
Conférencier, expert et auteur

Un autre regard sur le christianisme

Le christianisme pourrait se présenter à moi comme une démarche spirituelle compatible avec mes convictions et ascèses personnelles, mais seulement à certaines conditions peut-être inacceptables pour beaucoup de chrétiens ?

Il faudrait commencer par se détacher complètement d'une lecture exotérique des Evangiles. Jésus, en tant que personnage pseudo historique n'y joue aucun autre rôle que celui de symbole de l'homme qui chemine. Le mot-clé est Messie (de l'hébreu, ou Christ du grec). Et ce Messie est immanent à chacun : chacun porte son propre Sauveur (son propre mystagogue, pourrait-on dire) en lui-même.

Il faudrait ensuite rejeter clairement et radicalement le dualisme ontique que véhicule le christianisme exotérique et sa distinction inacceptable entre le monde de la Perfection (céleste, divin, immatériel, où trônerait le Dieu-Père) et le monde de la Vie (terrestre, humain, matériel, où règnerait le Diable). Ce dualisme doit être éradiqué et céder la place à un monisme radical : il n'y a pas deux mondes, mais un seul : celui-ci. Dieu est en Tout et Tout est en Dieu : il s'agit d'un panenthéisme.

Il faudrait enfin considérer la notion de Salut, comme un passage initiatique depuis le plan de conscience humain (relatif, éphémère, singulier) jusqu'au plan de conscience divin ou cosmique (absolu, éternel, global), et non comme un saut, au moment du décès physique, depuis le monde de la Vie jusqu'au monde de la Perfection.

Moyennant ces trois préalables, le christianisme pourrait se définir comme un cheminement initiatique qui va de la mort du "vieil homme" profane, à la résurrection du "nouvel homme" accompli. Ce cheminement se fait "dans l'imitation du Christ" en suivant les étapes, dans leur compréhension ésotérique, de la vie de Jésus telle qu'elle a été "légendée" par les Evangiles de la mouvance paulinienne (Marc, Matthieu et Luc) ou de la mouvance gnostique (Jean et les apocryphes alexandrins).

Il s'agit de passer du "Fils de l'homme" au "Fils du Dieu-Père", sous l'inspiration de l'Esprit.

Si l'on veut bien lire la "vie de Jésus" comme la narration ésotérique d'un cheminement initiatique, et si l'on veut bien dépasser les prescriptions de la morale humaine qui y sont exposées, pour les voir comme des marches de discipline intérieure, alors le christianisme pourrait devenir intéressant, à la condition de le débarrasser, une bonne foi pour toute, de tout le fatras dogmatique et ecclésial qui l'étouffe.

Le christianisme, dans ces conditions, convergerait harmonieusement avec les autres mouvances mystiques, initiatiques et ésotériques de toutes les grandes traditions religieuses.

Marc HALEVY, juillet 2017