Approche prospective
La prospective entend anticiper les évolutions contextuelles au profit de l'entité considérée (une personne, une communauté, une entreprise, une région, etc …) - et autant que faire se peut car les mondes complexes ne sont jamais des mécanicismes déterministes. Tant cette entité que son milieu global, sont des processus complexes dont les modèles ont été développés dans le cadre de la physique des systèmes, de la théorie des structures dissipatives et des modèles d'évolution cyclique, d'émergence et de bifurcation.
En gros, la prospective tente d'évaluer les évolutions de deux processus complexes intimement corrélés : l'entité concernée et ses milieux (ces deux concepts étant pris au sens le plus large).
Chaque entité complexe obéit à une seule et même logique qui est la dissipation des tensions entre trois dipôles universels :
- son projet (sa vision future) et ses patrimoines matériels et immatériels (ses accumulations passées),
- ses réseaux de ressources (son monde extérieur) et sa puissance culturelle (son monde intérieur),
- sa capacité intégrative ou associative (sa souplesse accommodante), et ses talents créatifs (sa constructivité émergentielle).
On comprend vite que chacun de ces dipôles est, en soi, une dialectique vivante :
- l'ambition du projet de vie est contradictoire avec une gestion sécuritaire des patrimoines,
- la conquête de territoires externes est contradictoire avec le renforcement des forces intrinsèques,
- l'uniformité consensuelle et empathique est contradictoire avec la force d'innovation et de différenciation.
On comprend aussi que les évolutions des milieux de l'entité auront des conséquences souvent importantes sur la pertinence du positionnement de cette entité par rapport à ses six pôles stratégiques.
Ainsi, notre époque vit une chaotisation globale et une bifurcation paradigmatique induisant, en même temps, six crises majeures décrites au niveau de la prospective globale du monde humain :
- la fin, conjointe, de la civilisation messianique (née vers 400) et du paradigme de la modernité (né vers 1500) ;
- la pénurisation généralisée des ressources naturelles, et le dérèglement climatique, biotique et environnemental ;
- la révolution numérique et le déplacement du centre de gravité des activités humaines,
- la complexification des interactions et le passage des modèles hiérarchiques verticaux aux modèles réticulés transversaux ;
- le passage d'une économie de masse basée sur la productivité, à une économie de l'utilité basée sur la virtuosité ;
- l'aspiration grandissante à donner du sens et de la valeur à l'existence humaine qui ne peut plus se réduire à "réussir socialement dans la vie".
L'efficacité prospective de chaque entité se mesure à sa capacité de confronter ses six pôles actuels d'évolution à ces six ruptures majeures de son environnement, et d'en tirer toutes les conséquences quant à la redéfinition de sa stratégie, de ses techniques, de son organisation, de ses valeurs, de ses talents et de ses compétences.
*