Contre l'effondrement.
Il faut parler de dialectique entre la Vie et l'Esprit.
Plusieurs mondes humains y sont envisageables … :
- Un monde dont la Vie et l'Esprit sont absents, un monde minéralisé, revenu au minéral, donc, un monde effondré …
- Un monde où la Vie triomphe et où l'Esprit s'étiole, un monde redevenu sauvage où l'écologie profonde a gagné sa bataille …
- Un monde, tout symétrique, où l'Esprit seul règne et où la Vie est remisée dans un coin, sans intérêt : c'est le monde qu'aurait voulu imposer le christianisme paulinien et augustinien, un monde où la chair est rejetée et honnie …
- Un monde où la Vie et l'Esprit trouvent un compromis, toujours hasardeux, toujours fragile, toujours instable, mais qui pourrait être pérenne si les paramètres n'y évoluent pas ou peu : un monde en équilibre précaire construit sur une démographie faible et stabilisée, et sur une frugalité impérieuse liée aux ressources exclusivement renouvelables … C'est le monde des "écolos" actuels.
- Et puis, il y a le monde où la Vie et l'Esprit trouvent dialectiquement, ensemble, une voie émergente radicalement inédite ; un monde où les humains seront au service exclusif de cette Vie et de cet Esprit ; un monde hissé à un nouveau niveau inédit de complexité, et dédié à l'accomplissement de la Vie et de l'Esprit au travers tout ce qui vit et pense, y compris les (des) humains. Comme à chaque fois, un tel processus d'émergence implique une inversion de valeur. Ce ne sont plus ni la Vie, ni l'Esprit qui sont au service de l'humain et de son anthropocentrisme, mais le radical contraire : ce sont la Vie et l'Esprit qui donneront sens et valeur à l'humain … seulement s'il contribue à leur accomplissement conjoint. Mais il est évident qu'un tel monde "supérieur" ne sera possible que si les humains apprennent rapidement la frugalité et la discipline, la modestie et l'austérité.
Il me semble que le choix d'une de ces cinq voies doit être fait maintenant. Sans tarder.
Pour choisir la première voie, il suffit de continuer à proliférer et à consommer comme aujourd'hui : l'effondrement est assuré.
La deuxième voie fait l'hypothèse fausse de la réversibilité de l'évolution.
La troisième voie est une impasse déjà horriblement expérimentée.
Il ne reste, en fait, que la quatrième et la cinquième voie. Elles ne sont en rien contradictoires. Il faut donc, si l'on veut éviter l'effondrement, les mener de conserve : la quatrième pour le court-terme et la cinquième pour le plus long terme.
Marc Halévy
Physicien, philosophe et prospectiviste
Le 08/02/2020