Tisserand de la compréhension du devenir
Conférencier, expert et auteur

Plaidoyer pour la rationalité

L'irrationalité monte, subrepticement, viralement, insidieusement …

Le constat salvateur et riche de la "rationalité" du Réel - où tout ce qui existe et advient a une bonne raison d'exister et d'advenir – a engendré cette perversion délétère qu'est le "rationalisme" triomphant des 19ème et 20ème siècles, avec, on le sait, les si funestes conséquences du nihilisme, de l'athéisme, du matérialisme, du cynisme financiariste et mercantiliste,  du pillage et du saccage de la Nature, bref : de la désacralisation de la Vie et de la déspiritualisation du Réel.

La confusion entre la "raison suffisante" (Anaxagore, Aristote, Thomas d'Aquin, Leibniz qui fondent la rationalité) et la "raison logique" (Platon, Descartes, Kant qui fondent le rationalisme) est terrifiante.

 

Du "rationalisme", Wikipédia dit ceci : "Le rationalisme est la doctrine qui pose la raison discursive comme seule source possible de toute connaissance du monde. (…) Ainsi, le rationalisme s'entend de toute doctrine qui attribue à la seule raison humaine la capacité de connaître et d'établir la vérité.".

 

Autrement dit, "rationalisme" est une doctrine épistémologique qui s'oppose, tout à la fois, à "empirisme" et à "intuitionnisme".

Comme si l'on pouvait ou devait opposer l'Intelligence humaine, qu'elle soit déductive (rationalisme) ou inductive (créativisme), à la Sensibilité humaine, qu'elle soit analytique (empirisme) ou holistique (intuitionnisme).

L'erreur fatale est de dualiser (d'opposer doctrinalement) ce qui n'est qu'une précieuse bipolarité (à activer dialectiquement).

 

Les immenses faillites, échecs et dégâts du "rationalisme" positiviste et nihiliste de ces deux derniers siècles, promeuvent, sous nos yeux, un irrationalisme dans les thèses et les opinions qui sous-tend une dangereuse et létale apologie de l'irrationalité.

Au nom des erreurs (légitimement constatées) du "rationalisme", on en vient à récuser la "rationalité" du Réel et à cautionner toutes les antisciences, pseudosciences ou parasciences les plus grotesques. Et les difficultés intrinsèques, pour le commun des mortels (et des journalistes), à comprendre les théories avancées de la cosmologie actuelle (quanticité, relativité, complexité) "n'arrangent pas les bidons".

 

D'autant que l'actuelle doctrine de la "libération de la parole" permet à n'importe quel crétin ignare de dire n'importe quoi sur tout, et surtout sur ce à quoi il ne comprend rien : les imbéciles sont devenus prétentieux et vindicatifs, et, au nom de l'égalitarisme ambiant, ne veulent plus ni reconnaître, ni assumer leur foncière imbécillité.

 

De plus, sur cette vague scélérate de l'anti-rationalité, surfe une permanente apologie de l'émotion. "Emotion" … L'échelon le plus bas, le plus reptilien, le plus primaire de la sensibilité. L'émotivité est tout à l'opposé de la sublimité.

Cette "émotion" puérile, dégoulinante de sensiblerie, de sentimentalisme, de pleurnicherie, de compassion, de commisération, est, en soi, une fuite, un déni et un refus de la réalité qui alimente tous les sectarismes, tous les fanatismes,  tous les militantismes, tous les activismes : il faudrait, selon ces pitres, que "l'idéal" triomphe du Réel. Au nom de tous ces larmoiements immatures, le Réel devrait rentrer, penaud, dans les moules étroits, étriqués et pauvres de l'idéalité humaine c'est-à-dire de la médiocrité, du ressentiment des médiocres et des minus habentes.

 

Marc Halévy

Physicien, philosophe et prospectiviste

Le 27/09/2020