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Virtuosité

Quelques notes sur l'idée de "virtuosité".

Dans le vocabulaire de la philosophie moderne, art est devenu synonyme de création et artiste est devenu synonyme de créateur, donc de générateur de nouveauté, d'originalité.

Ce n'est pourtant pas le sens du mot latin ars qui renvoie au grec technê.

Si l'on veut être cohérent avec ces étymologies, il faut postuler que l'art est l'ensemble de toutes les techniques qui permettent d'engendrer ou de faire émerger quelque chose de neuf, d'original.

L'art est technique d'engendrement.

L'art (latin) et la technique (grec) sont ainsi synonymes et ne s'appliquent pas seulement à l'engendrement du neuf et de l'original. On peut alors parler d'art de vivre, d'art d'apprendre, d'art d'aimer (comme Ovide) qui ne font pas nécessairement appel à de la création, à du neuf ou de l'original.

En revanche, cette idée de l'art pointe vers l'idée de virtuosité : l'artiste est le virtuose qui maîtrise parfaitement son art, c'est-à-dire sa technique.

Ainsi se réconcilie, comme avant la Renaissance, les notions d'artiste et d'artisan.

Les "beaux arts" ou les "arts plastiques" ne sont plus alors que des techniques parmi beaucoup d'autres qui, comme toutes, appellent à une maîtrise et à une virtuosité du meilleur niveau (ce qui n'est plus du tout le cas avec les "arts contemporains" qui, au contraire, rejettent la technicité et la virtuosité au profit du hasard, de la spontanéité, de l'immédiateté, etc …).

La mort de la modernité remet en selle cette acception ancienne de l'art comme virtuosité technique, puisque commence un ère néo-artisanale appelant le développement de toutes les virtuosités et excellences au sens compagnonnique de ces termes.

 

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L'art de la perfection minimaliste …

 

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La modernité, en toute cohérence avec elle-même, avait réduit la notion d'art au seuls "beaux arts", aux activités de l'artificiel et de l'inutile, de l'esthétique "libérée" de toute considération utilitaire. Ce qui est utile (artisanal) est "vulgaire", ce qui est inutile (artistique) est "noble".

Il est très symptomatique de l'idéalisme moderne, de ne considérer comme artiste que quelqu'un vivant au-dessus des contingences du monde réel, évoluant dans les hautes sphères éthérées de la "création pure".

Cette haine du Réel est, sans doute, le signe le plus distinctif de la modernité.

 

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Ce qui est admirable, ce n'est pas l'objet ou le trajet, c'est la virtuosité qui est inscrite dans cet objet ou ce trajet.

Telle est la signification que je donne au mot "esthétique".

L'esthétique, c'est cette sensibilité (aïsthêsis, en grec) à la virtuosité qu'elle soit celle d'un homme ou celle de la Nature, celle d'une main ou celle de l'Esprit.

 

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D'urgence, il faut cultiver l'esprit de virtuosité.

 

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La virtuosité culmine dans le Sacré dès lors que le virtuose est inspiré et induit une extase mystique.

 

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